English version: The Church of Our Lady of the Assumption.pdf
L’église, implantée hors les murs en rive gauche de la Roudoule, est progressivement intégrée dans les fortifications de la ville, formant elle-même rempart. L’abside semi-circulaire du milieu du XIIIe siècle est élevée en appareillage soigné et est animée par trois fenêtres d’égale dimension (l’une étant dissimulée par le presbytère du XIXe s.) et par une frise à dents d’engrenages.
Sur le mur nord, on remarque la trace d’un monumental portail latéral avoisinant sans doute le rempart aujourd’hui disparu contre son flanc gauche. Au XVe siècle, on remanie la façade en pignon. Le nouveau portail flanqué de colonnettes est surmonté d’un tympan sans décor. Au-dessus, on remarque une fenêtre murée remplacée par un oculus décentré plus tardif. Au XVIIIe siècle, à la suite d’un incendie de la charpente, on crée une voûte surbaissée et l'on ouvre des baies polylobées au sud.
Après le tremblement de terre de 1887, l’église est décorée de fresques du tessinois Adami dédiées à Saint Nicolas de Tolentino, saint patron de Puget-Théniers.
Les tutelles Au Moyen-âge, Notre-Dame de la Rodoline dépend de l’abbaye de Lérins qui possède plusieurs propriétés agricoles aux alentours de Puget-Théniers. L’église paroissiale prend alors le statut de « prieuré ». Plus tard, elle revient dans le giron du diocèse de Glandèves (Entrevaux), alors même que la frontière entre les Etats de Savoie et de Provence les sépare.
L'église abrite deux œuvres majeures du 1er quart du XVIe siècle provenant de l'ancien couvent des Augustins : le retable de la Passion à gauche de l’entrée et le retable de Notre-Dame du Bon Secours derrière le maître-autel.
Le RETABLE DE LA PASSION est généralement attribué à l’atelier de Matthieu d’Anvers qui laisse trace de son passage à Villars-sur-Var (statue de Saint Jean Baptiste) et Colmars-les-Alpes entre 1524 et 1530.
Cet ensemble exceptionnel, d’influence nordique, est conforme aux représentations de l’époque. Son caractère monumental et théâtral invite le fidèle dans une représentation presque vivante de la Passion, d’autant plus que le bois de tilleul était probablement polychromé à l’origine.
Le Calvaire : Le Christ est entouré des deux larrons (Dimas le bon, à sa droite, et Gestas le mauvais) entravés à des pièces de bois, leurs jambes profondément entaillées.
La Mise au tombeau : Nicodème et Joseph d’Arimathie (qui donne son tombeau) sont membres du Sanhédrin, le conseil suprême juif. Richement vêtus, ils portent sur un linceul le corps du supplicié. Debouts en arrière-plan, Jean, Marie et les saintes femmes manifestent leur émotion. Celle de droite porte deux attributs de la Passion : les clous de la Croix et la couronne d’épines. Tout à gauche, Marie-Madeleine, tête nue, n’est sans doute pas à sa place d’origine.
La Résurrection : La filiation divine du Christ se manifeste en ressuscitant d’entre les morts malgré les soldats chargés de garder le tombeau tantôt frappés d’effroi, tantôt endormis comme ici. On note leur armement caractéristique du début du XVIe siècle.
Le RETABLE DE NOTRE-DAME DU BON SECOURS, daté du 29 juillet 1525, est attribué à Antoine Ronzen dit le Vénitien, auteur du retable du Crucifix dans la basilique royale de Saint-Maximin (Var). Ce peintre d’origine flamande avait épousé Honorade, la fille du peintre pugétois Ludovic Luca.
Le caractère savant de cette œuvre évoque l'intercession ou le « secours », c’est-à-dire la possibilité de s’adresser à Dieu par la médiation de Marie. Ainsi voit-on dans un mouvement ascendant les regards qui se suivent jusqu’à la main du Christ désignant le Père : tel est le chemin de la prière émanant de celui qui semble être un homme de loi, probable donateur de l’œuvre. La cité est justement le cœur d’une circonscription administrative et judiciaire au XVIe siècle (la viguerie) et abrite donc un notable qui a pouvoir de justice au nom du duc de Savoie. Les attitudes de la Vierge « avocate des pécheurs » et du Christ supplicié, entouré des instruments de la Passion, sont éclairés par le texte au pied de la Croix emprunté à l’abbé Arnaud de Chartres (XIIe s.) : « Tu as un accès certain auprès de Dieu quand tu as le Fils devant la Mère et la Mère devant le Fils. Le Fils montre ses plaies et son côté, la Mère montre sa poitrine, aucune demande ne pourra être repoussée là où il y a tant d’amour dans le cœur ».
A gauche (et donc à la droite du Christ), Saint Nicolas de Tolentino, docteur de l'ordre des Augustins, tient un livre ouvert portant l’inscription : « J’ai observé tous les commandements de mon père Augustin ». A droite, Saint Jacques le Majeur en tenue de pèlerin porte un chapeau orné d’une coquille, d’un bourdon (bâton de marche et de défense) et des clés de Saint Pierre. Ces insignes rappellent les deux grands pèlerinages après Jérusalem : Compostelle et Rome. Dans le registre supérieur, on trouve à gauche Martin, saint patron de la ville avant que Saint Nicolas de Tolentino ne le remplace en 1710, et à droite le moine franciscain Saint Bernardin de Sienne ayant renoncé par trois fois à devenir évêque comme l'indiquent les mitres à ses côtés.
La fête patronale de Puget-Théniers Remarquez dans une chapelle latérale à gauche la statue de Saint Nicolas de Tolentino toujours portée en procession lors de la fête patronale début septembre qui dure plusieurs jours. On distribue à cette occasion des petits pains bénis en référence aux pains qu’il partageait avec les pauvres.